Il y a cinq ans, quand Karine Beaubien est devenue directrice adjointe de l’Hôtel du Jardin à Saint-Félicien, elle est arrivée dans ce poste avec une vision et des valeurs tout empreintes de ses préoccupations environnementales.

« Quand on pense à l’état de la planète, on peut faire un peu d’écoanxiété. Alors, je me suis dit, je veux faire quelque chose, à mon niveau, même si ce sont de petits gestes. »

Cinq ans plus tard, il n’y a pas que des petits gestes que toute l’équipe de l’Hôtel du Jardin a faits, inspirée par cette approche plus respectueuse de l’environnement que la direction avait souhaitée et souhaite toujours pour l’entreprise. 

Deux chefs, 100 % Terroir

En 2020, alors que Karine Beaubien vient de fermer son restaurant pendant un an pour tout renouveler, deux nouveaux chefs sont embauchés, Patrick Fournier et Sébastien Simard.   Dès ses premières rencontres avec eux, elle leur fait part de sa vision et de sa volonté que cette vision soit présente partout, en cuisine comme ailleurs dans l’hôtel. Les deux hommes sont emballés.

« On lui a répondu : on va te faire un menu 100 % terroir d’ici, raconte Patrick Fournier. Par l’achat local, on soutient les producteurs d’ici, on a des contacts directs avec eux, et on réduit le transport au minimum pour notre approvisionnement. »

Aujourd’hui, 90 % de ce qui entre dans la cuisine de Patrick et Sébastien, c’est du local. Mieux encore, ils ont leur propre jardin de fines herbes et de fleurs comestibles. Ils ont éliminé près de 100 % des contenants à usage unique, entre autres pour le lait et le beurre et, aujourd’hui, tous les restes sont compostés. 

Le compost, raconte Patrick Fournier, a été révélateur. « Ça nous a fait prendre conscience de ce que l’on jetait en trop grande quantité. Pas question de nourrir la poubelle. Alors on a réduit les portions de certains aliments. » Résultat, moins de déchets et des économies. En plus de tout cela, dans une préoccupation d’économie d’énergie, les deux chefs se sont familiarisés avec l’art de la cuisson sous vide. Une énorme économie d’électricité ou de gaz. Aujourd’hui, le Baumier est reconnu pour ses efforts. Le restaurant est un des ambassadeurs de Zone boréale Saguenay—Lac-Saint-Jean, ce grand regroupement de producteurs d’ici. De plus, le restaurant s’est classé parmi les 15 finalistes sur des centaines de restaurants au Québec pour l’excellence de leur utilisation des produits d’ici. 

Des changements dictés par l’écoresponsabilité

« Que ce soit en cuisine ou ailleurs dans l’établissement, explique Karine Beaubien, je ne fais aucun changement pour changer. Tout ce que je remplace, tout ce que je veux faire autrement, je le fais avec cette préoccupation du développement durable. »

Dans les chambres aussi on a éliminé tous ces produits qui ne durent pas. Il n’y aura plus aucune petite bouteille de shampoing, de rinçage, ni de petits savons individuels d’ici la fin de l’année. Tout va être remplacé par des distributeurs de produits biodégradables achetés en vrac. Les draps et serviettes sont lavés à la demande du client, et non pas tous les jours.  Et quand les textiles sont usés, ils se retrouvent au Cercle des fermières pour en faire des catalognes. « Quand je change du mobilier, poursuit Karine Beaubien, on fait tout ce qu’il faut pour pas que les vieux lits, les vieilles commodes ou le reste se retrouvent au centre de tri. Il est donné, ou vendu. »

Une intuitive particulièrement inspirée

Beaucoup de petits gestes, oui, et aujourd’hui Karine Beaubien applique ces considérations d’écoresponsabilité à d’autres dimensions de son entreprise. Il faut souligner ici, qu’il y a cinq ans, quand la directrice adjointe de l’Hôtel du Jardin est arrivée en poste avec cette vision « de faire quelque chose pour la planète », elle a fait cela sans conseiller spécial. Elle avait, à cette époque, peu de connaissance de tous ces concepts et même du vocabulaire de l’écoresponsabilité, admet-elle. Elle a fait tout cela intuitivement.  Mais force est d’admettre que son intuition était un bon guide, qu’elle ne s’est pas perdue en cours de route.

Mais voilà qu’il y a un peu plus d’un an, elle et son équipe sont invitées avec d’autres hôteliers de la région, à participer à un parcours collectif organisé par l’Association Hôtellerie Saguenay—Lac-Saint-Jean. Cette initiative, soutenue par Tourisme Saguenay–Lac-Saint-Jean, a comme objectif de « mobiliser les hôtels et centres de congrès de la région pour construire une destination de tourisme d’affaires responsable et durable ». 

Karine Beaubien est sortie de cette réflexion enrichie dit-elle :

« J’ai pris conscience que ce que j’avais fait n’était pas si mal, que je ne partais pas de zéro et que je pouvais aller encore plus loin. J’ai aussi beaucoup aimé me retrouver avec d’autres hôteliers pour échanger des idées. »

Toujours dans le cadre de ce « parcours collectif », l’Hôtel du Jardin a pu profiter de l’aide de conseillers en DD pour élaborer un plan d’action sur 5 ans. 

Un plan d’action : un outil essentiel pour la suite

Tout y est parfaitement documenté, exposé avec les moyens pour y parvenir. Il y est question du calcul et de la gestion des matières résiduelles, d’optimisation de l’usage de l’eau et de toutes sources d’énergie, d’approvisionnement responsable, tout autant que de communication des valeurs de l’entreprise et de formation du personnel. Le résultat de cet accompagnement, de tout ce travail de réflexion et des intuitions de Karine Beaubien c’est de comprendre que l’écoresponsabilité ne se résume pas aux seules actions environnementales, mais qu’elles comprennent aussi du social et de la bonne gouvernance.

« Je sais qu’il reste encore du travail à faire et avec ce plan d’action, on continue d’avancer.  Mais je sais plus que jamais où je m’en vais et je sais que tous mes employés embarquent dans ce mouvement, dit-elle. » 

Aujourd’hui, l’Hôtel du Jardin contribue de plusieurs façons au mieux-être de sa communauté. Entre autres, l’hôtel donne des surplus alimentaires à Amigo-frigo, un frigo communautaire au Cégep de Saint-Félicien.  Ce frigo permet à des dizaines, voire des centaines d’étudiants d’avoir accès à de la nourriture gratuite. « Ça permet de lutter contre la précarité étudiante, nous explique Tao Hulot, représentant de l’Association étudiante du cégep. Les livraisons ont lieu les mardis et les jeudis. On travaille avec l’Hôtel et également avec les supermarchés du coin. Ça répond vraiment à un besoin. » Et Karine d’ajouter :

« j’ai beaucoup d’étudiants dans mon personnel et même si je me sens jeune, ils sont plus jeunes que moi et me poussent un peu plus loin. Les jeunes sont très conscientisés. » 

Cette implication de l’Hôtel du Jardin ne s’arrête pas là. La direction collabore également aux campagnes de levée de fonds de Leucan, de Fonds jeunesse de demain et du Havre du Lac Saint-Jean (centre de soins palliatifs). 

« Quand j’ai commencé il y a cinq ans, conclut Karine Beaubien, je pensais à la planète, je pensais à mes deux enfants. Aujourd’hui, j’en retire beaucoup de fierté. » 

Pour les gestionnaires d’établissements hôteliers qui souhaitent imiter Karine, et ne savent pas par où commencer, jetez donc un coup d’œil à l’Activateur !

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Par Errol Duchaine