Le 5 novembre dernier, le gouvernement du Québec présentait sa Stratégie gouvernementale de développement durable 2015-2020. Divisée en 8 orientations et 27 objectifs à atteindre, elle encadrera les actions des quelque 130 ministères et organismes de l’État au cours des cinq prochaines années. Cette nouvelle mouture de la Stratégie aura-t-elle un impact sur les PME? Petit survol des éléments qui pourraient les interpeller…

Bien que les entreprises puissent retrouver des potentiels de croissance à travers les autres orientations (et certaines limites réglementaires à venir), c’est la deuxième orientation qui les interpelle directement, à savoir « Développer une économie prospère d’une façon durable – verte et responsable ».

Amener les PME vers le développement durable par le levier de l’approvisionnement responsable

Le premier objectif de ce volet, et probablement le plus important pour les PME qui font affaires avec les ministères et organismes, consiste à appuyer le développement des pratiques et des modèles d’affaires verts et responsables.

Concrètement, on souhaite que chaque rouage de l’appareil gouvernemental mette en œuvre des actions pour accroître à 30 % la proportion des entreprises privées québécoises qui ont amorcé une démarche de développement durable d’ici 2020. L’un des leviers dont les ministères et organismes disposent pour atteindre ce but est assurément celui des pratiques d’approvisionnement responsable. Faut-il le rappeler, l’administration générale du gouvernement dépense à elle seule plus de 800 millions $ en approvisionnement chaque année, et ce, en excluant les contrats de services et les travaux de construction. Ajoutons encore 439 millions $ pour le réseau de l’éducation et près de 1,7 milliards pour celui de la santé. Au total, l’État québécois achète pour environ 3 milliards de biens et de produits chaque année.

Déjà, de grands acheteurs publics, comme le Groupe d’approvisionnement en commun de l’Est du Québec, intègrent des critères sociaux et environnementaux à leurs appels d’offres en plus des critères traditionnels de coût, de proximité, de disponibilité, etc. Ces grands acheteurs publics vont de plus en plus jusqu’à demander à leurs fournisseurs d’être engagés dans une démarche de développement durable ou, encore, ils orientent leurs achats vers des produits plus durables, certifiés pour leurs conditions de production responsables aux points de vue environnemental ou social.

Les fournisseurs posent-ils des actions de développement durable ou se sont-ils dotés d’une politique complète? Les produits achetés sont-ils écoénergétiques? Remis à neuf? Réutilisables? À contenu reçyclés? Sont-ils offerts en vrac ou l’emballage est-il minimal, fait de matières recyclées et recyclables? La consommation d’eau, le caractère biodégradable, les émissions de gaz à effet de serre, les émanations toxiques sont autant des critères qui seront dorénavant pris en compte dans les achats du secteur public.

Le gouvernement envoie donc le signal que les achats du secteur public prendront de plus en plus cette direction. D’ailleurs, dans la première orientation de la stratégie, qui concerne la gouvernance, on confirme que, d’ici 2020, la moitié des structures gouvernementales auront intégré des considérations écoresponsables dans leur politique interne de gestion contractuelle ou auront élaboré une politique d’acquisition écoresponsable. À ce titre, dès 2016, le gouvernement se sera doté d’un système pour suivre l’évolution des achats responsables réalisés par les ministères et organismes, et réalisera un premier bilan l’année suivante.

Écofiscalité, soutien financier et étiquetage

Une autre action qui sera menée par l’État québécois consiste à accroître les mesures d’écofiscalité, telles que des taxes à l’enfouissement, les échanges de crédits de carbone ou des incitatifs à l’innovation. C’est donc dire que les PME qui seront proactives dans leurs pratiques de développement durable éviteront des frais et impôts supplémentaires, et profiteront de nouveaux crédits.

Les programmes d’investissements publics dans le soutien aux PME sont également visés pour l’intégration de critères d’écoconditionnalité. Les entreprises requérantes risquent de devoir montrer patte blanche avant d’obtenir des subventions dans certains programmes, même si l’attribution d’une aide financière ne touche pas directement un volet développement durable. Les ministères et organismes sont en effet appelés à réviser leurs critères d’octroi de subvention en ce sens et à privilégier l’investissement responsable en ajoutant une analyse de performance environnementale, sociale et de gouvernance à celle du rendement financier. 

Le ministre des Finances, Carlos Leitão, aidé par un groupe de travail, déposera dans les prochains mois une stratégie gouvernementale qui fixera les orientations et les objectifs guidant l’administration publique dans l’intégration de nouvelles mesures d’écofiscalité. « L’écofiscalité représente un moyen dynamique, innovateur et responsable pour l’avenir du Québec, et cela s’inscrit dans la logique du développement durable », souligne-t-il.

Finalement, on mise sur la sensibilisation du public à la consommation responsable et, pour appuyer cela, l’encadrement de l’étiquetage des produits, dont la certification en matière de développement durable dans des secteurs stratégiques. Avec ou sans l’implication de l’État, les entreprises voient déjà les consommateurs adhérer à de nouveaux principes de consommation responsable. L’étiquetage risque de  les obliger à leur fournir une information juste.

« Dans le cadre de la Stratégie 2015-2020, une impulsion plus forte est souhaitée pour contribuer au développement d’une économie plus résiliente et innovante, verte et responsable. » C’est le chemin dans lequel s’engage le gouvernement du Québec. Votre entreprise saura-t-elle s’adapter?

Frédéric Tremblay, agent de communication et de développement