C’est l’heure d’un premier bilan pour un des projets phares du CQDD intitulé Financement durable, pour une économie verte et responsable au Québec. Après deux ans et demi, une étape importante a été franchie. Les 20 MRC et organismes de développement économique local participant au projet ont tous finalisé les six étapes du parcours visant à intégrer de nouvelles considérations environnementales, sociales, de gouvernance (ESG) et de durabilité dans les programmes de financement aux entreprises.

Rappelons d’abord qu’ils sont, avec 89 autres organisations, des acteurs de premier plan, dans le soutien au démarrage et à la croissance des entreprises à travers le Québec. Ces derniers étaient jusqu’à tout récemment peu outillés pour, d’un côté, évaluer la durabilité des projets qui leur étaient présentés et, de l’autre, stimuler l’adoption de pratiques d’affaires écoresponsables par leur clientèle.

Et l’impact du projet ?

Pour démontrer la portée de ce vaste chantier, il y a un chiffre auquel il faut s’attarder :  60 millions de dollars par année ! Ces millions, c’est une enveloppe que se partagent ces 20 bailleurs de fonds pour soutenir les entreprises de leur territoire respectif. Alors qu’est-ce qui arrive avec ces 60 millions $ de soutien annuel ? Dorénavant, ils contribueront à l’adoption de pratiques d’affaires écoresponsables et, dans certains cas, pourraient se traduire par une bonification de l’aide financière. Pour plusieurs organisations qui ont participé à ce projet, l’accompagnement du CQDD a constitué un véritable levier pour nourrir leur réflexion sur le financement durable. C’est le cas de la MRC de Maria-Chapdelaine, comme nous l’explique sa directrice du développement, Sophie Grégoire-Tremblay :

Carole Tremblay

« Sans cette démarche-là avec le CQDD, on n’aurait pas entamé cette réflexion en financement durable aussi rapidement. Et c’est en parfaite concordance avec d’autres démarches, comme les Plans climat des MRC. Récemment j’ai rencontré un comité consultatif agricole et je voyais tout le potentiel pour ce secteur en financement durable. Ça nous positionne vraiment bien pour soutenir nos entreprises. »

Concrètement, qu’est-ce que cela veut dire ? Imaginons qu’une entreprise soumet une demande de financement pour un projet d’agrandissement ou d’acquisition d’équipement. L’analyse de cette demande et de son demandeur à partir d’une grille ESG permet de constater que ladite entreprise a réduit ses émissions de gaz à effet de serre, valorise ses résidus de production, privilégie des fournisseurs locaux et offre des dons et commandites à la communauté locale. Le taux d’intérêt de son financement pourrait ainsi être réduit de 2 % parce que l’entreprise adopte des pratiques écoresponsables notables.

Pour un projet de démarrage d’entreprise qui intègre en amont des considérations de durabilité, telles que l’écoconception des emballages, des circuits courts et une bonne gestion des matières résiduelles, on pourrait voir le montant d’une subvention bonifié de 5 000 $.

De l’accompagnement et de la formation

C’est donc pour soutenir ces bailleurs de fonds dans cette transition que cinq membres de l’équipe du CQDD ont accompagné et formé en financement durable pas moins de 80 conseillers aux entreprises œuvrant au sein de corporations de développement économique local provenant de 14 régions du Québec. Deux ans plus tard, on peut affirmer que ces conseillers sont parfaitement outillés pour sensibiliser les entreprises et les encourager à adopter de nouvelles pratiques d’affaires écoresponsables. Mieux encore, ils disposent de ces grilles d’analyse mentionnées plus haut pour évaluer le parcours de chaque entreprise et leurs efforts en matière d’écoresponsabilité et durabilité, les orienter vers de meilleures pratiques et même les diriger vers des accompagnateurs pour aller encore plus loin en ce sens.

Pas d’exclusion, plutôt des incitatifs

Mais attention, il n’y a rien de punitif ou de coercitif dans tout cela.

CQDD Photos Corporatives Finales

« On ne veut pas que cela soit défavorable au développement ou à la pérennité d’une entreprise, affirme Manon Gigot, coordonnatrice du projet Financement durable au CQDD. Au contraire, c’est vraiment un incitatif au changement vers l’écoresponsabilité, un soutien aux PME pour les rendre encore plus compétitives et pour qu’elles puissent faire face aux réglementations qui se resserrent, aux attentes des consommateurs de plus en plus élevées et aux exigences des grands donneurs d’ordre. »

En clair, tout cela témoigne, encore une fois, de changements de paradigmes, voire de culture du monde des affaires dans cette mouvance du développement durable. Si pendant longtemps, les principaux critères utilisés pour évaluer les projets d’affaires étaient la rentabilité attendue et la création d’emplois, il est maintenant courant de parler de critères ESG ou extrafinanciers pour évaluer la performance d’une entreprise.

Aux couleurs d’un territoire

Tout au cours du parcours d’accompagnement et de formation du CQDD auprès de ces 20 ODÉ, les conseillers du CQDD ont porté une attention particulière aux enjeux de durabilité spécifiques à chaque territoire en lien avec ses principaux secteurs d’activité. De plus, des réalités telles que la pénurie de main-d’œuvre, l’éloignement des grands marchés et la proximité des ressources naturelles ont aussi été pris en compte dans l’élaboration des outils développés et adaptés à chaque territoire. C’est aussi cela, la démarche de financement durable proposée par le CQDD :  une approche profondément enracinée dans les réalités des territoires. Loin d’être théoriques ou déconnectés, les interventions, réflexions et enjeux de durabilité ciblés s’inscrivent dans le contexte concret des communautés locales.

« Bien sûr qu’on se reconnaît dans cela, nous confie Sophie Grégoire-Tremblay de la MRC de Maria-Chapdelaine. Par exemple, dans notre positionnement stratégique, on veut valoriser encore davantage les secteurs forestiers et agricoles. Tout ça est parfaitement cohérent, ça s’inscrit dans un mouvement de circularité, dans des démarches qui sont plus innovantes, plus vertes. Bref, ça nous donne des leviers pour se propulser. »

À ce jour, ce sont plus de 200 entreprises qui ont été évaluées avec ces nouvelles considérations de durabilité. Au cours des 6 prochains mois, le CQDD continuera à soutenir les 20 corporations de développement économique dans l’appropriation de ces nouveaux critères de durabilité. Séances de coaching personnalisé, webinaires et autres moyens de communication seront utilisés pour favoriser l’appropriation de ces nouvelles façons de faire.

« Au-delà de notre parcours d’accompagnement, nous dit Manon Gigot, on a aujourd’hui tout un réseau de conseillers en entreprises qui peuvent échanger entre eux, partager des solutions, tester des choses. Les changements ne se feront pas de la même façon dans chaque organisation, mais on a créé un mouvement.

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Par Errol Duchaine, conseiller en communication au CQDD

Crédits photos : MRC de Maria-Chapdelaine et CQDD